13-La profondeur de champ revisitée
Dans cette troisième et dernière leçon consacrée à la mise au point, nous allons approfondir la notion de profondeur de champ (abrégée par PDC dans la suite), déjà abordée brièvement dans la leçon sur l’ouverture.
Nous avions vu comment la PDC était modifiée par l’ouverture choisie (nombre f). A présent, il est temps de voir comment utiliser la PDC comme un outil créatif.
Souvenez-vous, nous avions défini la profondeur de champ comme la distance entre l’objet net le plus proche et l’objet net le plus éloigné. Comme nous l’avons vu dans la leçon sur l’autofocus, un plan de mise au point est parallèle au capteur. Mais il y a en réalité deux plans de mise au point, parallèles entre eux, et tout ce qui se trouve entre eux est net. La distance entre ces deux plans est appelée profondeur de champ.
Je vous remets le petit schéma explicatif :
Sur l'image ci-dessus par exemple, le premier plan est parallèle à moi et intersecte l’étagère entre le ‘J’ et le ‘E’ de « SUBJECT ». Le second plan intersecte l’étagère à gauche du « S » de « BIOGRAPHIES ». Puisque les livres sont décalés vers l’arrière, le premier sur la gauche est juste derrière le second plan. Ainsi il est presque net mais pas totalement. Dans cet exemple, la profondeur de champ est d’environ 5cm.
Le contenu des deux dernières leçons traitait du positionnement du plan de mise au point qui est en fait situé entre les deux plans mentionnés plus haut. La profondeur de champ est la taille de la zone de netteté de part et d’autre de ce plan.
La faible profondeur de champ est une technique très utile pour diriger l’attention du spectateur exactement où on le souhaite : sur le sujet de notre photo. Le premier plan et l’arrière-plan seront floutés, toujours présents mais moins distrayants pour l’œil. C’est une technique qui permet de séparer les éléments dans une image.
Cela donne aussi à l‘image un look « propre », et nous avons tendance à considérer les images à faible profondeur de champ comme professionnelles, ou du moins de qualité supérieure. En vidéo, c’est aussi le cas et ce rendu est qualifié de « cinématographique », ce qui explique en partie le succès de l’arrivée des fonctions vidéo sur les reflex et hybrides, il y a quelques années.
Nous avons déjà vu qu’une façon pour obtenir une faible profondeur de champ est d’ouvrir son ouverture le plus possible (avec un petit nombre f), et c’est une des raisons pour lesquelles certains photographes dépensent autant d’argent dans des objectifs très lumineux (f/1.4 ou même f/1.2)
Pourtant, il y a deux autres paramètres affectant la profondeur de champ qu’on oublie souvent : la longueur focale et la distance :
La distance focale de l’objectif (pas son équivalent Plein Format) est le deuxième paramètre le plus important pour obtenir une faible profondeur de champ. Plus longue est votre focale, plus la profondeur de champ est faible. C’est la raison pour laquelle les appareils à grands capteurs peuvent plus facilement créer cette séparation, alors que c’est très difficile avec des appareils compacts (un plus grand capteur nécessite une plus grande longueur focale pour obtenir un angle de vue donné, si vous vous souvenez de la leçon). Pour les portraits, vous pouvez privilégier les grandes focales, pour ainsi créer une faible profondeur de champ.
Le dernier facteur est le ratio « distance entre vous et le sujet » et « distance entre le sujet et l’arrière-plan ». Si vous recherchez une séparation franche, approchez-vous très proche du sujet et/ou éloignez-le de l'arrière plan (c’est la raison pour laquelle les photos macro, prises de très proche, ont une très faible profondeur de champ). Au contraire si vous photographiez un sujet à 100m de vous, et que l’arrière-plan n’est qu’à 150m, il ne sera pas possible de créer beaucoup de séparation, quel que soit la taille de votre capteur de la focale de votre objectif.
Donc souvenez-vous juste : l’ouverture c’est important, mais ce n’est pas le seul facteur !
La faible profondeur de champ est un outil utile, mais bien sûr vous ne devriez pas l’utiliser sur chacune de vos images (sinon, l’effet perdrait de son impact !)
La plupart du temps, vous préfèrerez sans doute que tout soit net dans votre image. C’est souvent le cas dans des photos au grand angle, par exemple pour des paysages. Vous préférerez aussi sûrement une grande profondeur de champ quand la mise au point est difficile à réaliser, souvent en basse lumière, car cela vous permettra de faire une erreur sur la position de votre plan de mise au point et d’avoir tout de même votre sujet net. Pour obtenir une grande profondeur de champ, fermez simplement votre ouverture (grand nombre f), mais pas trop pour éviter la diffraction.
Il existe une astuce géniale que vous pouvez utiliser pour augmenter la profondeur de champ: la technique de l’hyperfocale. L’idée part du fait que si vous faites la mise au point sur l’infini (ce qui arrive souvent), vous « perdez » de la profondeur de champ. En effet, vous placez votre plan de mise au point sur l'infini et tout ce qui est au-delà de l’infini est aussi net
Ce que vous pouvez faire est de plutôt faire la mise au point plus proche de vous de manière à ce que le plan arrière délimitant la PDC soit juste à l’infini. Ainsi, vous aller maximiser la profondeur de champ.
Cette distance de mise au point s’appelle l’hyperfocale, et vous pouvez facilement trouver des calculateurs en ligne (ou une appli smartphone) : vous n’avez qu’à rentrer votre focale et votre ouverture pour obtenir la distance minimale à laquelle vous pouvez faire la mise au point pour inclure l’infini dans votre profondeur de champ.
Puisque cette distance nécessite des petits calculs et difficile à évaluer sur le terrain, cette pratique est plus répandue chez les photographes qui utilisent un trépied ou les photographes de rue.