Dans la leçon 5, nous avons vu qu’il y avait trois outils pour contrôler l’exposition : la vitesse d’obturation, l’ouverture et la sensibilité ISO. Parmi ces outils, la vitesse d’obturation est le plus intuitif et facile à comprendre.

La vitesse d’obturation désigne tout simplement le temps pendant lequel l’obturateur est ouvert, laissant le capteur ou le film exposé à la lumière. On l’appelle aussi « temps de pose». Habituellement, cette durée est exprimée en fractions de seconde (par exemple 1/50), car il est assez rare d’avoir besoin de durées excédant la seconde. Dans la suite de la leçon, j’utiliserai le terme « temps de pose », qui est je trouve plus évocateur d’une durée que le terme « vitesse » !
Bien sûr, plus le temps de pose est long plus la quantité de lumière reçue par le capteur est grande et donc plus l’image est exposée (c’est-à -dire lumineuse).
Comme pour tout ce qui concerne l’exposition, on parle de STOP ou de EV (Exposure Value) pour le temps de pose. Il s’agit d’une unité de mesure relative : une surexposition de 1 STOP signifie doubler la quantité de lumière reçue, c’est-à -dire multiplier par deux le temps de pose (par exemple passer de 1/50 à 1/25). Et vous l’avez deviné, une sous-exposition de 1 STOP signifie diviser par deux le temps de pose.
Mais pourquoi s'embête-t-on ? Le plus simple serait de laisser l’obturateur ouvert suffisamment longtemps pour obtenir une exposition correcte, non ? Certes, mais que se passe-t-il si pendant la durée d’ouverture de l’obturateur votre sujet ou vous-même bougez ? La réponse vous est sans doute familière : le flou de bougé !
Pour éviter cela, un temps de pose court permettra de figer l’action, en enregistrant l’instant précis au moment où vous avez appuyé sur le déclencheur.
Le jeu consiste donc à trouver un temps de pose suffisamment long pour collecter assez de lumière, mais aussi suffisamment court pour éviter le flou de bougé. Pour y parvenir, il est instructif de trouver votre limite à main levée, en dessous de laquelle vos images seront floues. Cette durée limite dépend de plusieurs facteurs :
- La vitesse de déplacement de votre sujet. Une personne marchant à rythme normal sera généralement nette à partir d’un temps de pose de 1/50 s. Les photographes de sport ont tendance à utiliser des temps de pose maximum de 1/500 ou 1/1000, parfois même encore plus rapides. Voici des exemples de sujet rapides nécessitant des temps de pose de 1/2000.



- La longueur focale que vous utilisez. Puisque les détails de l’image sont plus petits dans le cadre avec des courtes focales (grand angle), vous pouvez vous en sortir avec des temps de pose plus longs. A l’opposé, si vous utilisez un téléobjectif 500mm, le moindre mouvement apparaîtra complément flou.
- Votre capacité à rester stable. Cela dépend de votre âge, de votre condition physique, de votre entraînement, du poids de votre équipement, de votre position, de votre manière de tenir votre appareil, et bien d’autres facteurs (par exemple votre niveau d'addiction au café !)
- La présence de stabilisation optique sur votre appareil et/ou votre objectif. Attention, cela réduit juste le flou causé par vos propres mouvements (pas ceux de votre sujet), et vous fera gagner généralement 1 à 4 STOP (c’est-à -dire que vous pourrez utiliser un temps de pose deux à seize fois plus long).
De manière générale, vous pouvez garder en tête que la vitesse d’obturation limite à main levée est égale à 1/longueur focale (en équivalent Plein Format). Par exemple si vous photographiez avec un appareil Plein Format à 50mm, vos images seront nettes à partir du 1/50, dans la mesure où vos sujets sont statiques ! Avec un appareil à capteur APS-C, avec le même objectif de 50mm, cette vitesse limite serait plutôt 1/75 s (pour prendre en compte le facteur de conversion de 1,5). Ceci étant dit, cette limite dépend de tellement de facteurs que votre propre limite peut être au-dessus ou au-dessous.
Dès que vous avez trouvé quel est votre temps de pose limite à main levée, il suffit d’utiliser des temps de pose plus courts (des vitesses plus élevées). Lorsque cela n’est pas possible (souvent parce qu’il n’y a pas assez de lumière), vous devrez utiliser un trépied (ou bien compenser avec un autre paramètre de l'exposition) !
Dans certains cas, vous pouvez utiliser des temps de pose longs intentionnellement. Par exemple si vous voulez communiquer que votre sujet est en mouvement. Le cas le plus courant est le filé : au lieu d’avoir un environnement statique et un sujet flou, vous allez essayer de suivre le mouvement de votre sujet si bien qu’il sera le seul élément net dans l’image.
C’est un effet très efficace quand il est bien réalisé, mais qui demande beaucoup de pratique pour être maîtrisé. Il est utilisé très fréquemment dans les sports automobiles et en photographie d’oiseaux. Voici un exemple des JO de Rio 2016 :

Un autre effet populaire est d’utiliser une vitesse lente pour photographier la surface de l’eau, ce qui lui donne un look féérique et irréel. Vous aurez probablement besoin d’un trépied et d’un filtre ND pour réduire la quantité de lumière rentrant dans l’objectif. Un exemple d’image :

Un autre exemple plus créatif avec cette image de la station Grand Central à New York.

Maintenant, Ã vous !
Votre mission dans cette leçon est de déterminer votre limite à main levée. C’est assez simple : choisissez un sujet statique bien éclairé et réglez votre appareil en mode priorité vitesse. Placez-vous à votre focale la plus courte et prenez 3 photos à un temps de pose de 1/(focale équivalente) – 2 STOP.
Par exemple, si vous photographiez à 8mm avec un appareil à capteur micro 4/3 (facteur de conversion = 2), alors :
1/(focale équivalente)=1/16 s et 1/(focale équivalente) – 2 STOP =1/64 s (ce n’est pas grave si vous n’avez pas la vitesse exacte, choisissez la plus proche).
Ensuite reprenez 3 photos mais cette fois-ci avec un temps de pose 1 STOP supérieur, c’est à dire à un temps de pose de 1/(focale équivalente) – 1 STOP = 1/32 s
Continuer l’exercice en ajoutant un STOP à chaque fois (votre prochain temps de pose est donc 1/16s) , jusqu’à atteindre un temps de pose d’une seconde.
Enfin, refaites la totalité de cet exercice avec votre focale la plus longue.
A présent, téléchargez les photos sur votre ordinateur, et regardez-les en zoom 100%. Les premières photos de chaque série devraient être parfaitement nettes, et les dernières complètement floues 🙂
Trouvez le temps de pose à partir duquel vous passez de la plupart des images nettes à la plupart des images floues, et notez le nombre de STOP correspondant au-dessus ou au-dessous de 1/focale équivalente.
Félicitations, ce temps de pose est votre limite à main levée ! A noter que si votre appareil et/ou votre objectif sont stabilisés, vous obtiendrez des images nettes avec des temps de pose bien supérieurs à cette limite (parfois jusqu'à 4 STOP). Si vous avez envie, partagez ce temps de pose limite en commentaire, ça sera intéressant de comparer (note de Clément : je pense que je serai bon dernier à cause de mon ami le café 😅)
Une mission bonus pour finir : trouvez un sujet en mouvement ayant une direction prévisible et un arrière-plan chargé (le plus facile serait une voiture ou un vélo dans la rue), et essayez de réaliser de bons filés.
Souvenez-vous qu’il faut utiliser des vitesses lentes pour cet effet, 1/2 s est généralement un bon point de départ.